Après notre expérience mitigée sur le célèbre sentier du Tongariro Alpine Crossing, nous reprenons la route vers l’est et le Egmont National Park. Bien moins connu que son confrère, ce parc abrite pourtant en son cœur un autre volcan, le Taranaki, où nous avions aussi prévu de réaliser la randonnée jusqu’au sommet.
Comme nous avons l’après-midi de libre, nous en profitons pour rouler sur les routes secondaires à travers les jolis vallons du Whanganui. Ces reliefs si particuliers à la Nouvelle Zélande ne nous sont pas inconnus et nous rappellent ceux rencontrés sur la péninsule d’Otago du côté de Dunedin visitée plusieurs semaines auparavant. L’île du nord ressemblerait-elle finalement plus à l’île du sud que ce que nous avions imaginé ? Encore trop tôt pour le savoir. Le Taranaki nous apportera peut-être une réponse, qui sait.
Plusieurs heures de route plus tard, ponctuée de waaaah et de ooooh, la plaine se dessine devant nous. En plein centre, le dôme majestueux du Taranaki se détache du reste du paysage. Nous n’avons d’yeux que pour cet imposant mastodonte dont la forme conique si parfaite ressemble à s’y méprendre avec le Mt Fuji au Japon.
Nous nous arrêtons en bord de route pour une petite photo et nous en profitons pour chercher sur notre application un coin pour se poser. Quelle surprise de voir qu’un spot gratuit est disponible littéralement juste à côté, sur le parking du stade du village ! Lors de ce périple, aussi bien en Australie qu’en Nouvelle Zélande, je ne compte plus le nombre de fois où nous avons pu nous poser sur les parkings des stades et profiter gracieusement des sanitaires. J’aimerais tant qu’en France la population soit assez civilisée et propre pour que nous puissions faire de même…doux rêve.
La randonnée des Pouakai Tarn, les lacs miroirs
Quand nous nous réveillons le lendemain, nous avons la désagréable surprise de nous lever sous un ciel chargé, bien grisâtre. C’est pas top, mais tant qu’il ne pleut pas on s’en contentera. Nous n’avions de toute façon pas prévu de réaliser l’ascension du Taranaki ce jour-là. J’avais pris soin de poser une journée plus calme entre les deux grosses randos du Tongariro et du Taranaki. Enfin, plus calme, j’espérais bien quand même réaliser une petite randonnée dans le secteur.
J’avais déjà repéré la randonnée des Pouakai Tarn qui promettait de nous mener à un lac avec une beau reflet du Taranaki à la clé. Je n’avais pas trop d’espoir quant au reflet en cette journée maussade, mais bon, je n’avais ni le temps ni l’envie de trouver une autre randonnée plus appropriée.
Je ne vais pas m’épancher sur cette randonnée car je ne te la conseillerais pas vraiment. Beaucoup trop de marches à grimper et à descendre et un sentier à 90% en forêt sans aucune vue. Au sommet, ce n’est finalement pas tant le reflet manquant qui me chagrinait mais le fait que le Taranaki jouait à cache-cache avec les nuages. On peut le dire, une rando qui ne restera pas dans les anales.
Alors oui, le point de vue est sûrement splendide un jour de grand soleil, mais le sentier pour y accéder est tellement sans intérêt que je trouve que ça n’en vaut pas la peine. Ce n’est pas le nombre de randonnées qui manquent dans le parc Egmont, il en existe forcément d’autres plus agréables.
La randonnée au sommet du Taranaki
Le jour J est enfin arrivé ! A 5h du matin, j’étais encore plus excitée que pour le Tongariro. Il faut dire que cette ascension au Taranaki était un doux rêve que je ne pensais pas pouvoir réaliser. Avec 1600m de dénivelé et plus de 8h de marche en moyenne, c’était bien au delà de de mon effort maximum jamais atteint. Même la randonnée Angel’s Landing dans l’ouest américain me paraissait facile en comparaison.
Mais lors de ces deux mois de road-trip, nous avons marché. Beaucoup. Nous avons progressivement élevé la difficulté. Et j’ai aimé. Petit à petit mon corps s’était musclé et les douleurs des premières randonnées s’étaient estompées. Et la satisfaction de réussir à monter plus haut et surtout, de s’éloigner des randonnées trop fréquentées, me motivait à me lancer de nouveaux challenges sportifs à l’instar de cette randonnée au Taranaki.
Malgré l’excitation, c’est donc avec une pointe d’appréhension que nous rejoignions le parking du « visitor center » avant le lever du soleil. La randonnée étant longue, et le ciel ayant tendance à se couvrir l’après-midi, il est conseillé de commencer de bonne heure pour profiter des meilleures conditions pour marcher et profiter du panorama. Accessoirement, si ça permet d’éviter la foule, je ne suis pas contre.
Les randonneurs qui s’élancent sur le sentier sont invités à noter leurs coordonnées sur une fiche. Cela permet au secours d’intervenir rapidement si jamais nous n’avions pas rayés nos informations au retour de la randonnée. J’ai trouvé l’idée très intéressante, surtout pour les randonneurs en solo et le nombre de touristes qui n’ont aucun contact sur place.
Du parking au Tahurangi Lodge
Le jour se lève tout doucement quand nous commençons l’ascension. La première partie de la randonnée monte en pente, plus ou moins douce par endroit, sur une piste à flanc de volcan. Nous avons le droit à un magnifique lever de soleil sur une mer de nuage, avec juste les sommets emblématiques du Tongariro en toile de fond.
Je n’ai pour le moment absolument pas l’impression de grimper sur un volcan tant la végétation tropicale est luxuriante. Nous sommes entourés de fougères de toute sorte, mais nous savons bien que cela ne durera pas éternellement.
Cette première partie m’a paru relativement longue mais nous pouvons profiter d’une magnifique vue sur le Taranaki juste devant nous. Le sommet me parait encore bien loin, et aucune trace de sentier ne se distingue sur ses parois. Je me demande bien par où nous allons passer. Je tente de me rassurer en imaginant que le sentier est sûrement caché quelque part sur la face arrière du volcan…
Après environ une demi heure de marche, nous arrivons au Tahurangi Lodge situé à 1500m. Ce refuge d’altitude permet de loger 26 personnes et bénéficie d’une vue incroyable ! Clairement, si je devais retourner au Taranaki je pense que je réserverais une nuit ici pour profiter de l’expérience jusqu’au bout. A ce stade de la randonnée nous avons quitté la zone forestière, devant nous, de la lave, rien que de la lave. Et aucun sentier en vue. Le plus dur nous attend.
De la lave, beaucoup de lave
Nous continuons une centaine de mètres après le refuge et là, je vois. Et surtout, je comprends. Il n’y a vraiment PAS de sentier. Pour monter, il faut suivre les piquets plantés en ligne droite sur le flanc du volcan. Et s’il n’y a pas de sentier, c’est tout simplement parce que l’on évolue dans de la poussière de lave. Du gros sable quoi. Imagine monter une dune. Voilà, c’est pareil, sauf que c’est plus long et avec plus de dénivelé.
Mais bon, ma foi, on est là, on ne va pas faire demi tour. Et puis, j’ai envie d’aller tout là haut, moi ! Le sommet est à un peu plus de 2500m, il ne reste que 1000m de dénivelé, ça va le faire les doigts dans le nez ! Scoop, non.
En fait, il doit y avoir environ 800m de dénivelé dans cet espèce de sable. Heureusement que nous sommes partis de bonne heure, il n’y a vraiment pas beaucoup de monde, nous pouvons marcher à notre rythme. Et surtout, malgré l’altitude et la fraicheur matinale, il commence déjà à faire chaud au milieu de toute cette lave.
Sans surprise, cette partie de la randonnée n’est vraiment pas la plus intéressante et de surcroit c’est la plus difficile. Marcher dans le sable c’est compliqué, tu montes, tu glisses, tu découvres même certains muscles bien cachés qui se réveillent dans la douleur.
Mais après plusieurs heures, nous y arrivons enfin. Le mur rocheux nous surplombe.
De la roche et de la glace
Eh oui. Après la lave, la roche. Merveilleux !
Et quand je dis roche, je ne parle pas de petits morceaux de roche façon pierrier. Non, je parle de gros blocs de lave à escalader. Ca m’a beaucoup amusée, le co-randonneur beaucoup moins. Honnêtement c’est une portion très courte mais qui peut paraitre longue si on n’est pas à l’aise à grimper, surtout avec un peu de poids dans son sac à dos et si on a un peu le vertige. Faut juste pas regarder derrière soi et ça le fait bien 😉
Cela fait déjà plusieurs heures que nous marchons et point de sommet à l’horizon. Enfin si, mais il semble reculer davantage à chaque fois que nous avançons. Frustrant.
Nous passons finalement cette grosse boursouflure rocheuse et, oh, surprise ! (oui, cette randonnée au Taranaki est pleine de surprise). Devant nous, un immense cratère remplit… de neige verglacée. Alors franchement, c’est sublime, d’autant plus quand on ne s’y attend pas. Mais, après tous les efforts réalisés, je ne suis pas certaine de réussir à tenir sur mes jambes sans glisser au moindre faux pas.
On avance, doucement, mais sûrement pour atteindre l’autre côté du cratère où nous attend l’ascension finale pour rejoindre le sommet. Une petite grimpette de rien du tout au milieu de roches multicolores et avec un vent à décorner les boeufs !
Et puis, plus rien. Ca y est. Depuis le sommet du Taranaki nous contemplons le paysage devant nous. C’est loin d’être le plus beau panorama depuis un sommet, rien à avoir avec le Tongariro ou le Roys’Peak de Wanaka par exemple, mais c’est celui que j’ai le plus apprécié après tous les efforts fournis. Dans ma tête je ne pense qu’à une chose, j’ai réussi à faire 1600m de dénivelé. Une grande première pour moi, dont je suis encore extrêmement fière à l’heure où j’écris ces lignes.
Là haut, sur le sommet, je suis encore très loin de me douter des conséquences et des répercussions incroyables qu’aura cette randonnée sur mon avenir. Si j’avais su que 6 mois plus tard je réaliserais le GR20, suivi d’une multitude de treks en haute montagne, je n’en aurais pas cru un mot.
Il y a des moments qui changent une vie. La randonnée au Taranaki en fait clairement partie.
Mais à cet instant là, je savoure juste mon « exploit », mon Everest à moi.
Quelques photos et une bonne collation plus tard, nous reprenons le chemin en sens inverse pour rentrer. Si tu penses que la descente est plus facile, que l’ascension. Que nenni ! Les muscles de mes cuisses m’ont abandonnée à mon triste sort. Je tombe, je glisse, je me relève et je recommence. Cette descente aura été laborieuse, je ne te le cache pas. Dans la douleur, la souffrance et les pleurs, j’arrive tant bien que mal au parking. Epuisée, éreintée, exténuée, mais tellement heureuse et fière de moi.
Il nous aura fallu environ 8h pour réaliser cette ascension.
Et pour couronner cette sublime journée, ce soir-là, nous trouvons un camping idyllique, les pieds dans le sable avec vue sur le Taranaki. On n’aurait pu rêver mieux !
Et toi, dis-moi, que penses-tu de cette randonnée au Taranaki ?